La répartition des sièges aux chambres d’agriculture remise en cause
Dans un rapport, publié le 17 juin 2025, le Collectif Nourrir dénonce un manque de représentativité des chambres d’agriculture, après les dernières élections, liée au mode d’attribution des sièges.
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Le Collectif Nourrir, qui regroupe 54 organisations agricoles et écologistes, a publié un rapport dénonçant le manque de représentativité des chambres d’agriculture après les élections professionnelles de 2025. Dans le viseur du collectif : « la prime au gagnant » accordée pour le collège 1.
L’exception du collège 1
Pour rappel, les chambres d’agriculture sont composées de 33 membres, élus par dix collèges différents. Le nombre de sièges attribué à chaque collège diffère. Par exemple, le collège 3a (salariés de la production agricole) se voit attribuer trois sièges et le collège 4, des agriculteurs retraités, un siège.
Pour tous ces collèges sauf le premier, la répartition des voix se fait à la proportionnelle. Pour le collège 1 des exploitants agricoles et assimilés, qui représente 18 sièges, la liste arrivée en tête obtient la moitié des sièges. L’autre moitié est ensuite répartie proportionnellement aux suffrages recueillis par chacune des listes. Ce mode d’attribution des sièges donne donc un avantage au vainqueur, ce qui, selon le rapport « reflète mal la réalité des votes des agriculteurs et agricultrices en 2025 ».
Des résultats serrés aux dernières élections
« Cette année, on a des résultats d’élection très serrés dans beaucoup de départements qui acte une tripartition du vote des agriculteurs. Concrètement, on a une chute de l’alliance FNSEA-Jeunes Agriculteurs, une poussée de la Coordination rurale et une progression de la Confédération paysanne », détaille Valentin Brochard, chargé des axes stratégiques pour le Collectif Nourrir. Mais la subtilité de ces résultats ne se retrouve pas dans la composition des chambres, estime le collectif.
« Pour beaucoup de chambres, on est dans des mouchoirs de poche. Or, le système actuel est fait pour faire émerger un vainqueur incontesté. Là on est dans une situation où l’alliance FNSEA-JA, qui a remporté 47 % des voix, arrive en contrôle de 77 % des collèges 1 », poursuit-il. Selon les calculs du collectif, « si 2 % des agriculteurs et agricultrices inscrits avaient voté différemment, la moitié des chambres auraient ainsi vu une autre liste syndicale arriver en tête du collège 1. »
Simulation d’un scrutin proportionnel
Dans son rapport, le collectif a modélisé les résultats de cette élection si le mode d’attribution des sièges évoluait. Que se passerait-il si les 18 sièges du collège 1 étaient intégralement répartis à la proportionnelle ? La Confédération paysanne, actuellement majoritaire dans trois chambres d’agriculture, le resterait dans une seule. L’alliance FNSEA-JA ne dominerait plus 72 chambres mais 44. La Coordination rurale ne disposerait de la majorité des élus plus que dans 5 chambres, au lieu de 14. Et le Modef perdrait la seule chambre dans lequel il est aujourd’hui majoritaire.
Au-delà du mode d’attribution des sièges dans le collège 1, le collectif questionne également la pertinence des collèges 4 et 5, déjà épinglés par la Cour des comptes dans un rapport de 2017 et un autre de 2020. Généralement, ces collèges constituent une réserve de voix au profit de l’alliance historiquement majoritaire (FNSEA-JA). À eux deux, ils comptent pour 45 % des élus de la chambre et peuvent donc peser dans la composition finale du bureau, voire « faire basculer l’élection ».
« C’est notamment ce qui s’est passé cette année concernant les chambres de la Lozère, de la Charente-Maritime, du Loir-et-Cher et de la Gironde, où l’alliance FNSEA-JA a obtenu les voix des autres collèges pour disposer de la présidence et avoir un bureau conforme à ses souhaits, alors qu’elle avait perdu le vote des agriculteurs », précise le rapport.
Des enjeux financiers
« Au-delà de la question politique, ce mode électoral a des conséquences sur la santé financière des syndicats », explique Valentin Brochard. Une enveloppe d’environ 14,5 millions d’euros est attribuée par l’État aux syndicats agricoles. La répartition de cette somme dépend des résultats aux élections professionnelles du collège 1. Concrètement, 75 % de cette somme est allouée aux syndicats au prorata du nombre de voix obtenues lors des élections et 25 % au prorata du nombre de sièges obtenus dans les chambres.
« Là encore, ces financements sont grandement faussés par la “prime au gagnant” dont dispose le collège 1 et ne reflète aucunement la réalité des votes agricoles », souligne le rapport. Cette année, à la suite des résultats aux chambres, la FNSEA et les JA ont déploré un manque à gagner d’environ 700 000 euros pour chacune des organisations.
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